éditions du temps qui passe cybercarnet [blog] de Pascale Evrard
  • À bras le corps

    À bras le corps

    Il y aura presque une année, jour pour jour, que nous sommes revenus d'en bas de la france avec une "petite" presse lithographique dans le coffre de la voiture : "une antiquité" comme me l'avait alors décrite Reine Colin lors d'une conversation (autour de l'estampe) entre deux conférences (des Rencontres de Lure). À la fin de cette semaine de rencontres typographiques, j'ai décidé de me rendre sur place pour me rendre compte par moi-même de sa proposition.
    Longeant la montagne Sainte-Victoire, nous avons pris à droite pour entrer dans la ville de Rousset, et nous sommes arrivés chez Reine… avons découvert sa chapelle (idéale ?)… (Il y a parmi les "Lursiens" des personnes insoupçonnées ! mais pour respecter ma promesse, je ne monterai pas ici les photographies que j'ai emportées de cet édifice magnifiquement restauré dans sa simplicité de chapelle, les mosaïques et les vitraux de Reine. Ce grand ouvrage auquel elle a consacré une bonne partie de sa vie, m'a fortement impressionné.


    De retour à l'atelier, j'ai laissé un temps la presse de côté. "La rentrée" reprenant son cours, avec les bonnes résolutions qui s'en suivent, et parmi celles-ci : prendre (trouver ?) le temps d'apprivoiser ce matériel pour m'initier à la lithographie, une technique d'impression qui m'a toujours beaucoup attirée.
    Avec mes expérimentations antérieures — du trèfle à l'acétone (2013) à la madeleine litho-polyester (2014) — j'en arrivais désormais à La technique véritable… non sans déboires, vous l'imaginez.
    Depuis la conquête du bon matériel, jusqu'au bon usage de celui-ci.


    À commencer par le grainage des pierres — que Reine m'a transmises dans le même élan — chargées du passé de leurs empreintes.

    Décembre, dans sa course déjà… ! La tradition des vœux imprimés "du Temps qui passe" donne alors l'occasion à ma bonne résolution de se mettre à l'œuvre. L'idée ayant germé de rendre hommage à cette presse léguée qui devenait le sujet principal d'expérimentations dessinées (avec en filigrane une autre idée/hommage, pour cette autre "Presse" touchée en plein cœur dans sa liberté d'expression en ce tout début d'année).

    J'explore alors tous azimuts pour me familiariser avec la technique ; de la préparation de la gomme arabique, des dosages de l'acide, au report sur la pierre, et ce qui s'ensuit pour la bonne inscription de l'image en vue de son impression… sa reproduction à l'identique selon un nombre d'exemplaires déterminé… Pas une mince affaire, croyez-moi… d'autant que la presse effectivement, n'est pas toute jeune… mais je m'accroche.
    Ici, le remord se pose aussi comme le reste des gestes encrés, "il mord le support", sans autre possibilité de "pomme Z", laissant place à l'inattendu auquel on se fait, dont on tient compte pour le passage à venir et ainsi de suite, selon le nombre de "sur-impressions". Une activité de l'instant, avec lequel il faut compter pour cheminer vers l'image… à découvrir. Une activité qui mobilise tout le corps et concentre l'esprit dans "l'oubli du temps qui passe".


    Car il faut faire et refaire, c. à. d. toujours recommencer, répéter les gestes. Du grainage pour effacer, lisser selon le grain souhaité, pour préparer la pierre au report d'un nouveau dessin…


    L'idée de travailler les ombres portées m'est venue en observant les ombres de la presse sur le sol de l'atelier.
    Du dessin, vu de dessus, presque quitter la forme pour une autre forme de présence et de représentation.


    Abandonner le trait, l'encrage noir, pour des passages en couleur.


    À droite, une première tentative en deux passages (noir/rouge) abandonnée.


    (Je ne me suis pas facilité la tâche en portant les 3 reports (pour une impression 3 couleurs) sur une même pierre… à vouloir économiser l'huile de coude et par impatience, je me suis compliqué l'épreuve !).


    Premier passage ocre



    l'ajout d'un passage bleu


    puis d'un rouge.


    Avec ce baptême du feu… et les tirages qui s'amenuisent au fur et à mesure des passages… le nombre d'exemplaires s'avèrera considérablement limité…
    (Damned ! Une forme électronique sera largement déployée…)


    Les tirages trop hétéroclites, ne seront pas numérotés; enveloppés d'un texte-calque, ils seront envoyés dans une enveloppe "flambante".


    C'est mon coup de manivelle à moi pour en appeler à des temps moins violents.


    (c. à. d. : plus cléments).



    *ABRACADABRA n. m.
    Mot cabalistique auquel les anciens attribuaient une vertu magique pour guérir certaines maladies. (Les lettres de ce mot devaient être écrites en triangle où il fût possible de le lire en divers sens).

    publié dans : auteur - correspondance
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