C'est la première fois que je viens aux Rencontres par le train.
Un "Paris — Marseille Mistral" le temps d'un tourbillon sur l'esplanade magistrale de la gare Saint-Charles, vers le train régional qui traversera la Provence jusqu'à la Brillanne.
En attendant, des lions encadrent l'escalier, je déjeune d'un sandwich à l'ombre de l'air déjà chaud entre un jongleur de balles, des mélopées africaines, et un bel enfant aux boucles longues et blondes où s'incarne déjà, formidablement, une douce liberté occitane. De la graine de vent, un futur meneur de troupeau vers les herbes paisibles ?
Je décris en notes, dans mon carnet. Pattes de mouche plutôt que "messages à la seconde" ou "à la pelle".
Comment résister à ces nouveaux modes de partage immédiat quand l'œil qui se pose emporte le regard vers la vie et l'extase de son chant ?
C'est la première fois aussi, que je loge à Lurs même.
Rue de l'église, j'ai investi la chambre la plus haut perchée. La fenêtre s'ouvre sur un campanile et une chaîne de montagnes. Un été, décidément, sous le signe des cloches, le tintement des heures, leurs couleurs…
En sortant, je remarque une brouette.
Je pense au facteur cheval : un présage de travail, de lumière.
Et je pense à La Charité, à ce travail de folie accompli au début de l'été.
À l'entrée d'une ruelle presque en face de la maison, je lis ceci :
puis je trouve cela :
Une poursuite du "point perdu", qui perdure après La Recherche ?
J'arpente les ruelles du village, ses traverses si peu empruntées lors de mes venues passées, toute absorbée par la densité des Rencontres. Ici, cette fois, commence une véritable immersion dans le village des Rencontres.
Je partage la maison avec Brahim et Maha, nous ne nous connaissons pas.
(je suis "Là, lala)
Nous partirons ensemble pour "le coup de bleu", je leur montrerai le chemin des évêques.
Premières festivités d'arrivée : melon, pastis et pissaladières. Paniers de badges et constellations de conversations.
Lundi 21 août 2017
J'ai observé ce matin les nuances du ciel sur fond de campanile ; dégradé de nuit au jour, puis chapelet d'oiseaux au faîte du triangle de pierres (et de leur silence… !?) Seules, une multiplication d'ébats d'ailes en poses multiples et chaos graphiques. Des silhouettes franches en contrejour sur le ciel, découpées. Mais où sont leurs chansons ?
J'ai amené ma petite guitare alors je chante doucement pour ne pas réveiller mes colocataires, nous nous apprivoiserons avec les jours, et les petits déjeuners partagés tout en haut de cette maison en escaliers. Brahim et Maha seront plus détendus une fois leur conférence passée.
Bientôt, franchir le seuil de la Chancellerie…
et résumer en pages, mes impressions, mes rencontres (Internationales de Lure)…
C'est parti… pour une semaine carrément incandescente !
Sur ces mots, Adeline, notre présidente, conclue l'épisode personnel qu'elle vient de nous livrer (circulation d'émotions) et ouvre à la parade graphique des étoiles.
Marc Bernot commence le feuilleton quotidien qui s'achève sur cette conclusion :
"Il y aurait donc entre la contemplation du ciel et la contemplation des visages, un usage commun".
ça commence fort !
"Heureux celui qui peut dire à la fin d'une journée : voilà, j'ai vécu".
Il y a quelque chose du Carpe Diem d'Horace dans la présentation d'Yves Leterme.
Il est flamand et s'applique à parler français. Je m'amuse de ses délicieux néologismes.
Les intelligences artificielles d'Alexandre Lebrun, les mutations de l'art spatial avec Elsa De Smet, et le décryptage de la lune avec Chantal Jègues W.
Le (re)naissance de l'alphabet tifinagh avec mes chers colocataires, Brahim Boucheïkha & Maha Mouidine.
Et la petite constellation de notre cher Laurent Pizzotti.
…
Dans la nuit, nous sommes allés observer les étoiles, guidés par Christophe Delahaye et ses rayons laser.
Un joyeux trio d'amitiés franco-anglaise a vu le jour ce soir là : une constellation à trois, avec chacun notre ton et tempo (avec pour point de réunion de la constellation : David Bowie… and his Space Oddity, Life on Mars)… Alan, donc (et sa deudeuche : Mougette !), interprète-traducteur, un écho "chti" in english aux terrils de mon enfance dans le nord de la france, qui était là pour s'imprégner de l'atmosphère des Rencontres en vue d'une mission future… Vincent, graphiste-rêveur taciturne, à dos de "coincoin", le héros d'un album à paraître prochainement dans sa maison d'édition) et moi, petite étoile Stella (du genre un peu chantant : Qu'est-ce qu'elle a ? Stella ?).
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Mardi 22 août 2017
Ponctuer chaque jour qui commence avec des humeurs de campanile sur le ciel, avec toujours, les oiseaux.
Poursuivre avec le feuilleton 2 de Marc Bernot.
Une recherche d'équilibre très sage entre intériorité et extériorité, en espérant que la vie nous offre ces frottements qui nous font prêter attention à tout ce qui pourrait nous sembler "banal" dans un premier temps… Vers un monde up side down ? un peu quand même !
carnet Annie
Mercredi 23 août 2017
Merci Gérard pour ce beau travail d'archive de nos chères Rencontres !
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Les déjeuners Salle Luria, sur les sets typo de Jean-Renaud (enfin… à côté… la plupart auront dîné, déjeuné, à côté de leur set pour ne pas entâcher leur début de collection).
L'après-midi "parasol" et/ou atelier calli/Typo, d'un côté, de l'autre de la place du village. Côté levé ou couché du soleil.
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Jeudi 24 août 2017
André Baldinger
Ramuntcho Matta
Guillaume Dupra
La belle jeunesse : Tristan Pernet, Guillaume Guilpart du "Paris Print Club.
Kevin Donnot, Élise Gay et Anthony Masure pour la revue Back Office.
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Vendredi 25 août 2017
Oliver Leichenstein
et sa poésie du retournement.
Indra Kupferschmid
Marc Smith
Nicolas et Nicole… puis "Stella" ! (ma petite guitare n'est pas venue pour rien).
Merci à Michel Balmont qui m'a fait parvenir cette photographie.
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Les carnettistes, en grandes conversations et… constellations et partages.
Avant la dernière conférence, la clôture…
… avec un grand monsieur de la typographie américaine, dont nous avons porté le caractère toute la semaine, ce qui nous a permis de nous appeler par nos prénoms, direct !
Enfin, la fine équipe. La belle équipe de ces Rencontres.
Quelques pétanques en constellations
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Samedi 26 aout 2017
Un dernier matin, un dernier campanile avec la guitare, le chapeau et la douce dédicace de Claude, pour une dernière image dans la maison.
Et ma promenade,
vers le chemin des Evêques…
solitaire…
enfin presque…
Mes pas — Aller/retour — la semaine en revue, du coup de bleu au coup de blues.
Saluer les belles rencontres, monter dans la deudeuche d'Alan, et descendre jusqu'au train retour à La Brillanne-Oraison, retrouver du monde sur le quai. Quelques uns s'éparpillent à Marseille Saint-Charles. Pour les autres, ne pas se perdre de vue jusqu'au la gare de lyon.